Le français par la bande dessinéeUne bande dessinée pour apprendre le français (a comic strip to learn French), c'est ce que vous propose Bruno Lagrange.2024-03-11T08:15:59+01:00All Rights Reserved blogSpiritHautetforthttp://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/Bruno Lagrangehttp://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/about.htmlLes articles définis: le, la, lestag:leblogdebrunolagrange.hautetfort.com,2024-03-11:64889962024-03-11T08:14:31+01:002024-03-11T08:14:31+01:00 Articles définis.pdf
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Bruno Lagrangehttp://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/about.htmlPronoms personnels sujets, avoir, êtretag:leblogdebrunolagrange.hautetfort.com,2024-02-26:64869962024-03-04T08:35:27+01:002024-03-04T08:35:27+01:00 Pronoms personnels sujets,...
<p> </p><p style="text-align: center;"><a href="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/02/1756114888.2.JPG" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-6514507" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/02/3751986101.2.JPG" alt="pronoms personnels, French, comic strip, français, bande dessinée" /></a></p><p style="text-align: center;"><a href="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/01/02/4048439753.JPG" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-6514508" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/01/02/2550315365.JPG" alt="avoir, verbe, French, comic strip, français, bande dessinée" /></a></p><p style="text-align: center;"><a href="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/00/817927689.JPG" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-6514509" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/00/2774700245.JPG" alt="être, verbe, French, comic strip, français, bande dessinée" /></a></p><p style="text-align: center;"> </p><p style="text-align: center;"><a href="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/01/02/435913610.JPG" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-6514510" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/01/02/390220997.JPG" alt="pronoms personnels, avoir, être, verbe, French, comic strip, français, bande dessinée" /></a></p><p style="text-align: center;"><a id="media-6514968" href="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/02/02/2017931205.pdf">Pronoms personnels sujets, avoir, être, récapitulatif.pdf</a></p><p><a id="media-6514501" href="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/02/2327205005.pdf"></a></p>
Bruno Lagrangehttp://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/about.htmlIllusions perdues, de Balzactag:leblogdebrunolagrange.hautetfort.com,2021-11-22:63506862021-11-24T08:04:09+01:002021-11-22T08:43:00+01:00 L’œuvre capitale dans l’œuvre de Balzac Illusions perdues...
<p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><em><u><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif';">L’œuvre capitale dans l’œuvre de Balzac</span></u></em></span></p><p align="center"><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif';">Illusions perdues</span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><strong><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Lucien de Rubempré, un jeune homme très beau et plein d’esprit, rêve de devenir un écrivain célèbre. Monté à Paris, il se lance dans le journalisme, espérant ainsi obtenir la gloire, la puissance et l’argent. Mais il finira par se brûler les ailes. Dans ce roman foisonnant et riche en intrigues, Balzac démonte les rouages de la presse, s’inquiète de sa puissance, pointe ses dérives et prédit que le journalisme sera la folie de notre temps.</span></em></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"> <span style="font-size: 12pt;"> Lucien de Rubempré est un garçon de vingt-deux ans, beau comme un dieu grec. Il est mince, blond, aux yeux bleus ; sa beauté est féminine, nous précise Balzac. En tout cas, les dames de la bonne société de son Angoulême natale se pâment devant lui. Il est plein d’esprit et écrit avec talent. La nature l’a gâté, mais il possède un défaut qui pourrait gâcher toutes ses qualités : il est vaniteux et a une haute idée de lui-même. Son véritable nom est Lucien Chardon, mais il prétend s’appeler Lucien de Rubempré, Rubempré étant le nom de jeune fille de sa mère, qu’il entend relever. Il veut acquérir la gloire, la puissance et l’argent. Ne doutant pas de son talent, il croit que son recueil de vers <em>Les Marguerites </em>et son roman <em>L’Archer de Charles IX</em>, s’ils étaient édités, rencontreraient tout de suite le succès et lui procureraient la gloire littéraire.</span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"> <img id="media-6312633" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/02/00/530861712.2.jpg" alt="Illusions perdues, Balzac, La Comédie humaine" /> <span style="font-size: 12pt;"> Plein d’ambition, Lucien monte à Paris, bien décidé à percer dans les milieux littéraires. Ses manuscrits à la main, il va voir Dauriat, libraire-éditeur. Mais ce dernier dédaigne ses œuvres : il ne veut pas prendre le risque d’éditer un inconnu. Dauriat privilégie les écrivains qui ont déjà un nom connu et dont la notoriété assure le succès : <em>« On n’entre ici qu’avec une réputation faite ! Devenez célèbre, et vous y trouverez des flots d’or » </em>déclare Dauriat à Lucien ; lequel, dépité, répond : <em>« Mais, Monsieur, si tous les libraires </em>(libraires=éditeurs, NDLA] <em>disent ce que vous dites, comment peut-on publier un premier livre ? »</em></span></span></p><p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Balzac prend le contre-pied de Walter Scott</span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"> </span></em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Lucien rencontre un jeune écrivain, Daniel d’Arthez : celui-ci accepte de lire le manuscrit de <em>L’Archer de Charles IX</em>, puis donne à Lucien quelques conseils pour améliorer son style narratif. C’est l’occasion pour Balzac, à travers d’Arthez, d’exposer sa conception du roman et de son mode de construction. Balzac, ou plus précisément d’Arthez, prend le contre-pied de Walter Scott : il déconseille à Lucien d’ouvrir son roman par un dialogue, la forme littéraire la plus facile ; il lui recommande de commencer par des descriptions qui doivent précéder le dialogue : « <em>Que chez vous le dialogue soit la conséquence attendue qui couronne vos préparatifs ». </em>Balzac en profite pour s’en prendre aux libraires-éditeurs, qui ont peur du risque et veulent absolument dénicher un Walter Scott à la française qui leur assurerait le succès ; il nous dit qu’ils ont tout faux et feraient mieux de faire preuve d’originalité :<em> « Une des plus grandes niaiseries du commerce parisien est de vouloir trouver le succès dans les analogues, quand il est dans le contraire. » </em>En conclusion, d’Arthez conseille à Lucien de remanier son manuscrit et de beaucoup travailler ; la route sera longue, mais à la longue, sa peine sera récompensée.</span></span></p><p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Il n’y a pas de meilleure publicité qu’une bonne polémique</span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Parallèlement, Lucien fait une autre rencontre, celle d’un jeune journaliste, Etienne Lousteau, qui écrit des critiques de livres et de spectacles. Aussitôt, Lucien est fasciné par le métier de journaliste et les facilités qu’il procure : Lousteau entre sans payer dans les théâtres, et les gens importants sont pleins d’égard pour lui. Il fait miroiter à Lucien les possibilités que procure le métier, un métier facile à exercer, le journaliste n’ayant pas à faire preuve d’originalité. Comme le précise Lousteau, il est là pour relater et commenter le travail des autres : <em>« Mon cher, travailler n’est pas le secret de la fortune en littérature, il s’agit d’exploiter le travail d’autrui. »</em> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Les journalistes font la pluie et le beau temps, et leur arme suprême est de faire l’impasse totale sur un sujet, car il n’y pas de meilleure publicité qu’une bonne polémique pour assurer la notoriété d’un roman ou d’une pièce, selon Lousteau : <em>« Les actrices payent aussi les éloges, mais les plus habiles payent les critiques, le silence est ce qu’elles redoutent le plus. Aussi une critique, faite pour être retoquée ailleurs, vaut-elle mieux et se paye-t-elle plus cher qu’un éloge tout sec, oublié le lendemain. La polémique, mon cher, est le piédestal des célébrités. »</em></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Dès qu’il a compris le pouvoir de la presse, Lucien veut en être et s’exclame : <em>« Je triompherai ! »</em> Daniel d’Arthez et ses amis du Cénacle le mettent en garde : <em>« Tu serais si enchanté d’exercer le pouvoir, d’avoir droit de vie et de mort sur les œuvres de la pensée, que tu serais journaliste en deux mois. </em>[…] <em>Tu n’as que trop les qualités du journaliste : le brillant et la soudaineté de la pensée. Tu ne refuseras jamais un trait d’esprit, dût-il faire pleurer ton ami. Je vois les journalistes aux foyers des théâtres, ils me font horreur. » </em>Mais Lucien est décidé, sa voie est tracée ; il s’accroche et s’incruste dans <em>Le Journal</em>, où travaille Lousteau. </span></p><p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">« Des articles lus aujourd’hui, oubliés demain,</span></em></strong></span></p><p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">ça ne vaut à mes yeux que ce qu’on les paye. »</span></em></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;">Le journaliste dispose d’un pouvoir sur les autres : si un libraire-éditeur déplaît à un rédacteur, alors, même s’il publie un chef-d’œuvre, son livre sera assommé par la critique. Ainsi, quand le nommé Nathan publie un livre qui plaît particulièrement à Lucien, celui-ci a de bonnes raisons de vouloir le <em>« démolir »</em>, mais il se sent incapable de dire du mal d’un livre auquel il a trouvé de grandes qualités. Or, <em>« le journaliste est un acrobate »</em>, selon Lousteau, qui montre à Lucien par quel tour de force il peut changer les qualités du livre en défauts, tout en lui trouvant des mérites, afin de convaincre le lecteur de l’impartialité de sa critique.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;">Cette attitude, qui consiste à écrire le contraire de ce que l’on pense, est-elle choquante ? Non, répondent les journalistes ; car, comme le souligne un confrère nommé Blondet, <em>« tout est bilatéral dans le domaine de la pensée. Les idées sont binaires. » </em>Blondet, s’appuyant sur l’exemple de Rousseau, apostrophe Lucien : <em>« Rousseau, dans </em>La Nouvelle Héloïse<em>, a écrit une lettre pour et une lettre contre le duel, oserais-tu prendre sur toi de déterminer sa véritable opinion ? »</em> Somme tout, un journaliste sage et raisonnable ne doit pas mettre trop de lui-même dans ses articles, car, ainsi que le souligne un journaliste du nom de Vernou, <em>« des articles lus aujourd’hui, oubliés demain, ça ne vaut à mes yeux que ce qu’on les paye. »</em> Selon lui, les journalistes sont <em>« des marchands de phrase »</em>.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;">Balzac nous montre les journalistes travaillant dans l’urgence. A dix heures du soir, aucun article à publier le lendemain n’est encore écrit. Les rédacteurs se mettent au travail dans la nuit et <em>« bâclent » </em>leurs articles en quelques minutes. Un bon journaliste est un journaliste qui écrit rapidement et qui sait s’adapter à toute situation.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;">Lucien apprend vite. Il publie un premier article bien ficelé, salué par ses confrères. <em>« Il a de l’esprit »,</em> dit un rédacteur ; <em>« Son article est bien »</em>, dit un autre. En étalant ses qualités professionnelles, Lucien croit qu’il sera récompensé par une ascension rapide. Bien au contraire ; car Lousteau, celui-là même qui l’avait introduit au <em>Journal</em>, va le jalouser : <em>« En regardant Lousteau, </em>[Lucien] <em>se disait : « Voilà un ami ! » sans se douter que déjà Lousteau le craignait comme un dangereux rival. Lucien avait eu le tort de montrer tout son esprit : un article terne l’eût admirablement servi. »</em></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Lucien sera victime de la jalousie de ses confrères, mais aussi de lui-même, de sa vanité et de ses faiblesses de caractère. Pourtant plein d’esprit, il prend tout au premier degré ; il boit les compliments qui lui sont adressés, sans douter de leur sincérité ; et il ne comprend pas qu’il affronte des adversaires qui voient plus loin que lui et jouent, si l'on peut dire, du billard à trois bandes.</span></p><p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Balzac nous met en garde contre la presse,</span></strong></span></p><p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">« ce cancer</span></em></strong><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"> <em>qui dévorera peut-être le pays »</em></span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"> « Le journalisme sera la folie de notre temps ! » </span></em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">s’exclame, dans un élan visionnaire, un personnage du roman, qui anticipe le développement à venir de la presse. Dans la préface du livre, Balzac lui-même nous met en garde contre la presse, <em>« ce cancer</em> <em>qui dévorera peut-être le pays »</em>. Il s’inquiète de la puissance de la presse et pointe des dérives qui, deux siècles après la publication de son livre, n’ont fait que s’amplifier.</span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Balzac accordait une importance première aux <em>Illusions perdues</em>, dont il disait que c’est <em>« l’œuvre capitale dans l’œuvre »</em>. Pourtant c’est un roman qui, au premier abord, semble difficile à lire. Le livre est épais, l’intrigue est foisonnante, et les personnages sont nombreux. Si le lecteur ne se montre pas patient, il aura du mal à accrocher et se découragera vite. Si, en revanche, il a l’esprit disponible, alors il se passionnera pour les aventures et les mésaventures de Lucien de Rubempré ; il sera emporté dans un tourbillon d’intrigues et de manipulations qui ne cesse d’enfler au fil des pages ; il trouvera le roman si riche que, après l’avoir refermé, toute lecture d’un autre auteur risque de lui paraître fade. <em>Illusions perdues</em> est une œuvre maîtresse de Balzac : son génie romanesque et son talent visionnaire éclatent au fur et à mesure que l’histoire avance.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Déjà très riche en péripéties, les <em>Illusions perdues </em>sont la porte d’entrée<em> </em>de <em>Splendeurs et misères des courtisanes</em>, roman qui racontent la suite de l’histoire de Lucien de Rubempré, et qui s’annonce tout aussi passionnant. A la fin des <em>Illusions perdues, l</em>e lecteur s’est tellement attaché à Lucien qu’il est navré d’avoir assisté à son naufrage. Il le laisse en si fâcheuse position, qu’il n’a qu’une envie : savoir ce qu’il advient de lui.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: left;"><span style="font-size: 12pt;"><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Illusions perdues</span></em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"> de Balzac (1843), collections Folio, Garnier et Le Livre de Poche (On pourra préférer l’édition du Livre de Poche plus aérée, qui reprend la division en chapitres tels qu’ils furent publiés en feuilleton dans la presse.)</span></span></p>
Bruno Lagrangehttp://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/about.htmlCamille Claudel, de Bruno Nuyttentag:leblogdebrunolagrange.hautetfort.com,2017-06-21:59561822021-05-19T10:54:51+02:002021-05-19T10:41:00+02:00 Le portrait d’une artiste passionnée Camille Claudel...
<p align="center"><em><u><span style="font-size: 12.0pt; font-family: 'Arial','sans-serif';">Le portrait d’une artiste passionnée</span></u></em></p><p align="center"><strong><span style="font-size: 18.0pt; font-family: 'Arial','sans-serif';">Camille Claudel</span></strong></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><strong><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Isabelle Adjani a fait sortir de l’ombre Camille Claudel en retraçant sa vie dans ce film dont elle a confié la réalisation à Bruno Nuytten. Elle incarne une jeune femme convaincue de sa vocation d’artiste. Sa rencontre avec Rodin doit être la chance de sa vie. Ce sera la source de son malheur.</span></em></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Dans la famille Claudel on connaissait Paul, l’écrivain, mais on avait oublié l’existence de sa sœur Camille, le sculpteur, jusqu’à ce qu’Isabelle Adjani lui redonne vie dans un film biographique sorti en 1988. Elle en confia la réalisation à Bruno Nuytten, lequel centra le film sur la relation qu’entretinrent Camille et Rodin.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> <a href="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/02/3420346931.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-6260072" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/02/3124694026.jpg" alt="camille claudel,bruno nuytten,adjani,depardieu,laurent grévill,alain cuny,madeleine robinson" /></a> L’histoire débute en 1882, au moment de leur première rencontre : Rodin, ou plutôt maître Rodin, ainsi qu’on l’appelle respectueusement, est un artiste reconnu et couvert d’honneur ; il est dans la force de l’âge, tandis que Camille est une jeune fille qui fait ses débuts dans la vie ; elle est convaincue de sa vocation d’artiste, et sa rencontre avec Rodin semble être la chance de sa vie. Le maître s’intéresse à son travail et la prend sous sa protection. Il la fait venir dans son atelier et l’initie à son art. Rodin a une personnalité hors du commun et fascinante : ainsi, quand il est amené à découvrir une sculpture faite par un autre, plutôt que de la regarder d’emblée, il préfère, dans un premier temps, fermer les yeux et la tâter pour en sentir les formes. Il donne à Camille des conseils judicieux, lui recommandant de ne pas penser en surface, mais en relief, et de ne pas hésiter à forcer sur les muscles pour donner du volume à ses œuvres. La proximité entre les deux êtres est devenue telle que Camille est non seulement la collaboratrice de Rodin, mais aussi l’un de ses modèles et l’une de ses maîtresses.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Camille mène une vie d’artiste qui est en complet décalage avec son milieu social : les Claudel sont de grands bourgeois fiers de leur nom, et Mme Claudel est profondément choquée de voir que sa fille préfère jouir de sa liberté, plutôt que de se ranger et de mener une vie convenable. Mais M. Claudel, lui, a des idées plus larges, et il croit en la vocation de Camille. Il l’autorise à entamer sa dot pour assouvir sa passion. Plein d’admiration, il se constitue une espèce de <em>press-book</em> dans lequel il colle soigneusement les coupures de presse consacrées à sa fille et à ses expositions. Cependant, avec le temps, il commence à douter de sa fille et se demande si sa rencontre avec Rodin, plutôt que d’être une chance, ne pourrait pas être la source de son malheur. Il soupçonne le grand homme de l’exploiter et s’inquiète de savoir si au moins il la paye.</span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Dans un moment de furie,</span></strong></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Camille détruit une bonne partie de son œuvre</span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Quand Camille ouvre les yeux et prend conscience que Rodin l’a utilisée à son profit, il est trop tard ; les années ont passé et sa jeunesse a fui. Elle l’accuse alors de lui avoir tout volée, ses années et son travail. Lui, il s’en défend, prétextant d’avoir à chaque fois cherché à l’aider. En fait, l’attitude du grand homme est difficile à cerner. D’un côté on a l’impression qu’il n’hésite pas à mettre ses femmes et ses ouvriers au service de son art et de sa réussite : on le voit mener une vie de grand bourgeois habitant dans une vaste demeure, il n’est pas un artiste maudit condamné à la misère, mais un ambitieux assoiffé d’honneurs et prêt à toutes les bassesses pour avancer dans la carrière ; d’un autre côté on apprend, au cours du film, qu’il n’hésite jamais à user de ses relations pour appuyer Camille et lui susciter des commandes, quand l’occasion lui en est fournie.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Au milieu de ses déboires, Camille trouve un restant de stabilité auprès de son frère cadet Paul, dont elle est très proche. Elle contribue à son initiation en lui faisant découvrir un écrivain à la réputation sulfureuse : Rimbaud. Mais elle est décontenancée quand il lui annonce sa conversion au catholicisme. Et quand, devenu diplomate, il quitte la France pour New-York, elle est carrément déboussolée ; car, en perdant Paul, elle perd son dernier repère. Elle se réfugie alors dans son art et y met toute son énergie. Elle vit dans l’isolement, enfermée dans son atelier qui se transforme peu à peu en cour des miracles. Elle a soif de reconnaissance et souffre de ne pas la trouver. Devenue aigrie, elle finit par indisposer les âmes bienveillantes à son égard. Elle se montre désagréable avec ceux qui lui offrent leur aide et n’honore pas les commandes qu’ils lui procurent. Elle se consume peu à peu et, à force de ne plus parler à quiconque, elle commence à perdre l’usage de la parole. Dans un moment de furie, elle détruit une bonne partie de son œuvre. Constatant sa folie, sa famille envisage de l’interner.</span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Dans le film, une espèce de clair-obscur</span></strong></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">donne du volume aux êtres de chair et aux œuvres de marbre</span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Isabelle Adjani dans le rôle de Camille Claudel n’est pas sans rappeler le personnage d’Adèle Hugo, qu’elle avait joué dix ans plus tôt, sous la direction de Truffaut. Elle est pleine de passion et se montre presque violente dans ses sentiments. Depardieu joue un Rodin à la silhouette imposante, reconnaissable à son chapeau d’artiste à larges bords ; c’est un jouisseur qui dévore la vie et les femmes. Alain Cuny dans le personnage de M. Claudel est grave, hiératique et sombre. Il est dans son propre rôle d’homme de théâtre quand il déclame à haute voix des vers de son fils Paul.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Avant d’être réalisateur, Bruno Nuytten avait d’abord été chef opérateur, si bien qu’ici il a particulièrement soigné l’image. Le film a été tourné en décors naturels ; seule fait exception la tour Eiffel, montrée en arrière-plan, et que l’on voit s’élever vers le ciel au fur et à mesure que l’histoire avance dans le temps. La lumière est très importante : une espèce de clair-obscur donne du volume aux êtres de chair et aux œuvres de marbre. Seule la bande-son et les dialogues auraient gagné à un être un peu plus clairs. Le film est long, il dure près de trois heures, et il est lent, ce qui peut décourager les spectateurs impatients. Mais, les autres, après avoir vu ce film, garderont longtemps en mémoire le personnage de Camille.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Isabelle Adjani, en incarnant Camille Claudel, aura largement contribué à faire sortir son œuvre de l’ombre. Depuis un musée Camille-Claudel a ouvert ses portes, à Nogent-sur-Seine.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Camille Claudel,</span></em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"> de Bruno Nuytten, 1988, avec Isabelle Adjani, Gérard Depardieu, Laurent Grévill, Alain Cuny et Madeleine Robinson, DVD Studiocanal.</span></span></p>
Bruno Lagrangehttp://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/about.htmlMaleviltag:leblogdebrunolagrange.hautetfort.com,2017-06-27:59579302021-02-08T10:06:26+01:002021-02-08T10:00:00+01:00 Récit d’anticipation sur le monde après la bombe Malevil...
<p align="center"><em><u><span style="font-size: 12.0pt; font-family: 'Arial','sans-serif';">Récit d’anticipation sur le monde après la bombe</span></u></em></p><p align="center"><strong><span style="font-size: 18.0pt; font-family: 'Arial','sans-serif';">Malevil</span></strong></p><p style="text-align: justify;"><strong><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"><span style="font-size: 12pt;">En 1972, Robert Merle imagine à quoi ressemblerait la planète après une attaque nucléaire : la marche des siècles serait interrompue et l’humanité reviendrait à la vie des tribus primitives. </span></span></em></strong><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Malevil<em> est un roman qui sent le parfum des années soixante-dix, mais qui a gardé toute sa fraîcheur.</em></span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Pendant la Guerre froide le monde vécut sous la menace permanente de la bombe atomique. Cette menace stimula l’imagination des romanciers et des scénaristes : que se passerait-il en cas d’utilisation de l’arme nucléaire ? que resterait-il de la terre ? y aurait-il des survivants ? quels seraient leurs moyens de subsistance ? l’espèce humaine pourrait-elle échapper à l’extinction ?...</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> <a href="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/02/4022446677.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-6225182" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/02/1877437468.jpg" alt="Malevil, robert merle" /></a> En 1972, Robert Merle tenta d’apporter des réponses à ces questions dans <em>Malevil</em>, un roman d’anticipation censé se dérouler cinq ans plus tard, soit en 1977. Ce pavé de six cents pages commence comme un roman ordinaire, presque comme un roman banal. Le narrateur, Emmanuel Comte, âgé de quarante ans, raconte son enfance à Malejac, un village du sud-ouest de la France ; il revient sur ses années d’études à l’Ecole normale des instituteurs, et explique comment il a pu acheter Malevil, un grand château fort du XIIIe siècle à demi en ruines.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Le <em>jour de l’événement</em>, à Pâques 1977, Emmanuel Comte et ses amis sont réunis dans la cave de Malevil pour parler de politique : ils envisagent de présenter une liste à Malejac, à l’occasion des élections municipales. Tout à coup, au cours de la réunion, un bruit énorme se fait entendre. Le narrateur lui-même peine à le décrire : <em>« </em>[…] <em>Eclata un tapage dont je ne puis donner une idée que par des comparaisons qui, toutes, me paraissent dérisoires : roulements de tonnerre, marteaux pneumatiques, sirènes hurleuses, avions perçant le mur du son, locomotives folles. En tout cas, quelque chose de claquant, de ferraillant et de strident, le maximum de l’aigu et le maximum du grave portés à un volume de son qui dépassait la perception. »</em> Une fois que le calme est revenu, Emmanuel Comte et ses amis comprennent de suite que la France vient de subir une attaque nucléaire.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Au bout d’un moment, ils veulent se risquer hors de leur cave. Se pose alors la question de la radioactivité qui a pu subsister dans l’air. Fort opportunément, l’un des survivants dispose d’un compteur Geiger qui lui permet de mesurer la radioactivité et de constater qu’elle est négative. Une fois à l’air libre, du haut du donjon de Malevil, Emmanuel a du mal à reconnaître le village de Malejac : <em>« Tout le village avait l’air d’avoir été aplati d’un coup de poing et disséminé à ras de terre. Plus un feuillage. Plus un toit de tuiles. »</em> Plus loin, le narrateur parle d’<em>une planète morte</em> et fait un tableau propre à effrayer le lecteur de 1972 : la campagne est carbonisée, il n’y a plus un animal, plus un oiseau, plus un insecte, seulement de la terre brûlée.</span></p><p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Il faut patienter une centaine de pages</span></strong></span></p><p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">avant que le roman commence vraiment</span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> C’est à ce moment-là, au bout d’une centaine de pages, que le roman commence vraiment, avec cette poignée d’hommes qui vont lutter pour subsister. Heureusement pour eux, quelques bêtes ont survécu. Mais, pour se nourrir, il faudrait cultiver la terre ; or la terre, étant brûlée, produira-t-elle quelque chose ? Pour produire, il faudrait de l’eau ; or, s’il y a des poussières radioactives dans l’atmosphère, la pluie va les entraîner et elles vont contaminer les cultures. Une fois de plus, le compteur Geiger va s’avérer fort utile.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Au bout de quelques semaines, le petit groupe s’élargit en recueillant d’autres survivants, parmi lesquels une femme appelée Miette, qui est en âge de procréer. Or, si les survivants ne se reproduisent pas, la mort de l’espèce humaine est inéluctable, ainsi que le déplore le narrateur. Surgissent alors un certain nombre de questions : quand dans le groupe il n'y a qu’une seule jeune femme, faut-il la réserver à quelqu’un en particulier ? faut-il se la partager ? faut-il la laisser libre du choix de son partenaire ? dans ces circonstances exceptionnelles, la morale et la monogamie ont-elles encore droit de cité ?</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Les soirées sont longues et ennuyeuses à Malevil. Le seul livre qui reste à Emmanuel est une Bible que lui a laissée son oncle défunt qui était protestant. Trouvant des ressemblances avec ce qu’ont vécu les tribus primitives, Emmanuel décide de lire à haute voix la Bible et donne en modèle à ses compagnons ce qu’il appelle « <em>l’opiniâtreté à vivre que les juifs</em> <em>avaient montrée »</em>. Pas à pas, il en vient à introduire une religion de substitution qui maintient la cohésion du groupe.</span></p><p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">L’abbé Fulbert a transformé son village en véritable théocratie</span></strong></span></p><p align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">et contrôle les individus au moyen de la confession obligatoire</span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Un jour, se présente à la porte de Malevil un homme nommé Fulbert et qui se dit prêtre. Fulbert est un personnage truculent qui donne toute sa saveur à l’histoire. Convaincu de sa propre supériorité, il fait preuve de caractère et exerce sa domination sur le village voisin de La Roque, où existe un autre groupe de survivants. Fulbert s’est autoproclamé abbé de La Roque, transformée par ses soins en véritable théocratie. La pratique obligatoire et régulière de la confession lui permet de contrôler directement les individus. Il tente d’étendre son emprise sur Malevil. Mais Emmanuel est décidé à lui tenir tête. Pour ce faire, il tente de se faire élire abbé de Malevil. Le lecteur est le témoin de la lutte acharnée que se livrent entre eux les deux hommes.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> L’attaque nucléaire est une véritable cassure qui a interrompu la marche des siècles. Des groupes de survivants se promènent dans la nature, cherchant à arracher ce qui leur permettra de survivre. L’anarchie règne, ainsi que le constate Emmanuel : <em>« L’évidence est aveuglante : il n’y a plus d’Etat tutélaire. L’ordre, c’est nos fusils. Et pas seulement nos fusils : nos ruses. Nous qui à Pâques, n’avions que le paisible souci de gagner les élections de Malejac, nous sommes en train de nous inculquer, une à une, les lois implacables des tribus primitives. » </em>La notion de progrès a disparu. Il n’y a plus d’automobile, tout trajet doit se faire à pied. Et puis, ce qui est terrifiant, c’est que dans ce monde sans médecin et sans médicament, la moindre infection peut devenir mortelle.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> <em>Malevil </em>est un récit d’anticipation qui sent le parfum des années soixante-dix, mais qui a gardé toute sa fraîcheur. Le lecteur doit faire preuve de patience pour entrer dans le roman et se familiariser avec les personnages, qui prennent de la consistance au fur et à mesure que l’histoire avance. On peut même dire que le roman prend tout son intérêt et toute sa saveur une fois que le prétendu abbé Fulbert entre en scène.</span></p><p><span style="font-size: 12pt;"><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"> </span></em></span></p><p><span style="font-size: 12pt;"><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Malevil</span></em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">, de Robert Merle, 1972, collection Folio.</span></span></p>
Bruno Lagrangehttp://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/about.htmlSur la scène internationale avec Hitler, de Paul-Otto Schmidttag:leblogdebrunolagrange.hautetfort.com,2017-05-16:59445032020-10-23T09:25:38+02:002020-11-02T07:22:00+01:00 Témoignage unique sur le III e Reich Sur la scène...
<p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif;"><em><u><span style="font-size: 12.0pt;">Témoignage unique sur le III<sup>e </sup>Reich</span></u></em></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif;"><strong><span style="font-size: 18.0pt;">Sur la scène internationale avec Hitler</span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong><em>Paul-Otto Schmidt fut l’interprète personnel de Hitler. Il fut le témoin d’entretiens que le dictateur allemand eut avec Mussolini, Chamberlain, Pétain… Il fait le portrait d’un Hitler moins sûr de lui qu’on ne pourrait le croire. Le dictateur veut avoir sa guerre, mais à condition qu’elle soit menée contre un ennemi facile à abattre.</em></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong><em> </em></strong> Quand Hitler accéda à la chancellerie du Reich, Paul-Otto Schmidt était interprète au ministère des Affaires étrangères, communément appelé la Wilhemstrasse, du nom de la rue où étaient situés les bureaux dudit ministère. Dans le courant de l’année 1935, Hitler eut besoin d’un interprète pour une conversation prévue avec le ministre britannique des Affaires étrangères. L’un de ses collaborateurs lui cita alors le nom du Dr Schmidt, réputé pour maîtriser parfaitement l'anglais, ainsi que le français. Quand Hitler apprit que ce fonctionnaire avait travaillé à Genève auprès de la SDN (Société des nations), il fut d’abord réticent à faire appel à lui ; puis il accepta de le prendre à l’essai. Non seulement l’essai fut concluant, mais Hitler fut vivement impressionné par les capacités de Schmidt, si bien qu’il le félicita en ces termes : <em>« Vous vous êtes remarquablement acquitté de votre tâche. Je ne soupçonnais pas qu’il pût exister un tel art de la traduction. Jusqu’ici, j’avais dû m’arrêter à chaque phrase pour qu’on pût traduire. » </em>Hitler fut si satisfait de Schmidt qu’il décida d’en faire son interprète personnel ; c’est ainsi que celui-ci assista aux rencontres du chancelier allemand avec des personnalités telles que Mussolini, Franco, Llyod George, Chamberlain, Eden, le duc de Windsor, Daladier, Pétain, Laval, Darlan… Dans bien des cas, Schmidt fut seul témoin de ces entretiens au cours desquels il servait d’interprète aux deux parties. D’où une neutralité voulue de sa part, l’interprète n’ayant pas à prendre partie ou à montrer ses sentiments, mais se devant de traduire les propos tels qu’ils sont tenus.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> <a href="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/01/3792242450.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-6184088" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/01/3134498522.jpg" alt="sur la scène internationale avec hitler,paul-otto schmidt" /></a> L’impartialité voulue à laquelle prétend Schmidt le conduit à porter un jugement nuancé sur les hommes et les événements. Au cours des années, il est parvenu à découvrir les différents visages du dictateur. Il y a d’abord le Hitler qui sait user de ses charmes pour dire à son interlocuteur ce qu’il a envie d’entendre. Le récit de sa conversation avec Llyod George (Premier ministre du Royaume-Uni en 1918) est hallucinant : Hitler lui serre la main en lui disant que pour les Allemands c’est lui, Llyod George, qui est le véritable vainqueur de la Grande Guerre ; et l’ancien Premier ministre britannique repart enthousiaste, en déclarant à Schmidt à propos de Hitler : <em>« C’est vraiment un grand homme ! »</em> Au cours de nombre d’entretiens diplomatiques, Hitler se montre un négociateur calme et courtois, qui s’exprime avec adresse et intelligence, loin du nazi farouche que dépeint la presse anglaise. Mais, à plusieurs reprises, en face de ses visiteurs, Schmidt le voit, sans transition, céder à des explosions de violence verbale. <em>« On l’eût dit devenu un autre homme »</em>, note Schmidt. Puis sa colère, feinte ou simulée, retombait, et il redevenait aussi calme qu’il l’avait été avant l’incident.</span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong>Hitler parlait 80 à 90 pour 100 du temps,</strong></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong>et c’était seulement tout à fait à la fin</strong></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong>que Mussolini pouvait prononcer quelques mots</strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> Hitler se plaisait à rester dans les généralités et détestait que son interlocuteur le poussât à préciser sa pensée. <em>« C’est un fait</em>, écrit Schmidt, <em>que j’ai pu constater bien des fois en travaillant pour lui. Il préférait les développements généraux, les grandes lignes, les perspectives historiques et les vastes considérations philosophiques. Il évitait le plus souvent les détails concrets, car, en les abordant, il eût pu être conduit à trahir trop nettement ses véritables intentions. » </em></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> Aux dires de Schmidt, Hitler avait la même attitude à l’égard de Mussolini. Il était avare de détails face à son allié et se gardait bien de lui dévoiler ses plans d’invasion, préférant le mettre devant le fait accompli. Bien que Mussolini comprenait l’allemand, Schmidt assistait à ses entretiens avec Hitler et traduisait en français les propos du chancelier. Schmidt souligne qu’au cours de ces rencontres Hitler monopolisait la parole : <em>« Ces entretiens ne furent jamais des conversations au véritable sens du mot. Il vaudrait mieux les appeler des monologues de Hitler, pour bien préciser, car le dictateur allemand absorbait 80 à 90 pour 100 du temps, et c’était seulement tout à fait à la fin que Mussolini pouvait prononcer quelques mots. »</em></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong>Lorsque, en 1936, il décida de remilitariser la Rhénanie,</strong></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong>Hitler eut très peur d’une réaction de la France,</strong></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong>mais elle ne vint pas</strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> Il serait facile pour nous, près d’un siècle plus tard, de réécrire l’histoire à la lumière de ce qui est advenu ; néanmoins, à lire Schmidt, il était encore possible, en 1936, d’arrêter Hitler à moindre frais. A cette date, le dictateur décida de faire entrer les troupes allemandes en Rhénane, violant ainsi le traité de Locarno qui en faisait une zone démilitarisée. Il eut alors très peur d’une réaction de la France, mais elle ne vint pas, et il en fut extrêmement soulagé. Même pendant la guerre, Hitler revint, en présence de Schmidt, sur cet épisode et déclara à plusieurs reprises : <em>« Si les Français avaient alors avancé, nous eussions dû nous retirer avec notre courte honte, car les forces militaires dont nous disposions étaient insuffisantes même pour tenter une résistance modeste. »</em></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> Devant ses interlocuteurs Hitler se faisait facilement menaçant, notamment face à Chamberlain venu le rencontrer à Berchtesgaden à l’été 1938, en pleine crise des Sudètes. Le dictateur lui déclara sans ambages : <em>« Dans très peu de temps, j’aurai réglé cette question, de ma propre initiative, d’une manière ou d’une autre. »</em>. Schmidt traduisit la dernière expression par <em>« one way or another »</em>, Le Premier ministre britannique comprit aussitôt que Hitler n’excluait pas l’usage de la force et réagit vivement en disant que dans ces conditions sa présence était devenu inutile à Berchtesgaden et qu’il ne lui restait plus qu’à rentrer à Londres. Alors, à la grande stupéfaction de Schmidt, <em>« l’inattendu se produisit, Hitler battit en retraite » </em>A la veille de ce qui sera appelé les Accords de Munich, Hitler consentit, au dernier moment, à négocier ; ce revirement conduit Schmidt à avoir ce commentaire : <em>« J’eus alors </em>[…] <em>l’impression que Hitler s’effrayait devant les conséquences extrêmes. »</em></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong>A l’annonce de la déclaration de guerre de l’Angleterre,</strong></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong>dont Schmidt lui fait part,</strong></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><strong>Hitler demeure pétrifié</strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> De la lecture de ce livre il ressort que Hitler voulait avoir sa guerre, mais une guerre localisée, contre la Pologne, un ennemi facile à écraser. A l’été 1939, Ciano, ministre italien des Affaires étrangères, visita Hitler au Berghof et le mit en garde contre un risque de réaction des puissances occidentales en cas d’invasion de la Pologne. Dans son récit, Schmidt écrit qu’il entend encore la phrase que prononça Hitler à cette occasion : <em>« Je suis persuadé, dur comme fer, que ni l’Angleterre, ni la France n’entreront dans un conflit général. »</em></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> Le 31 août, la Wehrmacht entre en Pologne. Le 2 septembre, l’ambassadeur de Grande-Bretagne en Allemagne appelle la chancellerie et demande à être reçu, le lendemain à 9 heures, par Ribbentrop, ministre des Affaires étrangères du Reich, afin de lui faire part d’une communication en provenance de Londres. Ribbentrop comprend que la communication n’aura rien d’agréable et qu’il s’agit probablement d’un ultimatum. Malgré la gravité de la situation, il se défile et ordonne à Schmidt de recevoir à sa place l’ambassadeur. Le lendemain, un dimanche, à 9 heures précises, c’est donc Schmidt, interprète au ministère des Affaires étrangères, qui reçoit l’ambassadeur britannique, lequel lui remet un ultimatum qui équivaut à une déclaration de guerre de son pays. Aussitôt Schmidt se rend à la chancellerie où l’attend Hitler et lui traduit l’ultimatum remis par la Grande-Bretagne. Schmidt décrit la réaction du dictateur : <em>« Hitler restait comme pétrifié, regardant droit devant lui. </em>[…] <em>Il resta complètement silencieux et immobile à sa place. Au bout d’un moment, qui me parut une éternité, il se tourna vers Ribbentrop qui était resté comme figé, à la fenêtre. </em>" Et maintenant ? " <em>demanda Hitler à son ministre des Affaires étrangères, avec un éclair de fureur dans les yeux, comme s’il voulait exprimer que Ribbentrop l’avait faussement informé sur la réaction des Anglais. Ribbentrop répondit à voix basse : </em>" Je présume qu’au cours des heures prochaines, les Français vont nous apporter un ultimatum équivalent. " <em>»</em> Sur ce point Ribbentrop eut raison, puisque, peu de temps après, la France remit à son tour un ultimatum aboutissant à un état de guerre.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> Malgré le déclenchement des hostilités, Hitler eut encore besoin des services de Schmidt. Il assista notamment à la signature de l’Armistice avec la France, à Rethondes, en juin 1940, et servit d’interprète lors de l’entrevue avec Pétain, à Montoire, quelques mois plus tard.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> Schmidt eut quelques ennuis à la fin de la guerre, car, lors de son arrestation, il était revêtu d’un uniforme SS : selon lui, Hitler, qui ne voulait plus le voir en civil, l’avait obligé à enfiler une telle tenue. Il est vrai que, comme l’écrit l’auteur, <em>« dans le III<sup>e</sup> Reich, un uniforme n’était qu’un costume de figurant »</em>, tant les Allemands, sous le nazisme, était devenu un peuple en uniforme.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> Schmidt, qui déclare ne pas avoir été nazi, tire une leçon de tous ces événements et se dit convaincu que la catastrophe qui se produisit fut rendue possible parce que l’Allemagne s’était éloignée des lois morales, essentiellement chrétienne. <em>« J’ai constaté, au cours de ma carrière, </em>écrit-il, <em>que les hommes d’Etat et les peuples qui s’écartent de ces principes sont finalement conduits à la catastrophe, quelques trompeurs que puissent être des succès initiaux, remportés pendant une période plus ou moins longue. »</em></span></p><p style="text-align: justify;"> <span style="font-size: 12pt; font-family: arial, helvetica, sans-serif;"> Le témoignage de Paul-Otto Schmidt constitue un document de première importance pour comprendre les coulisses du III<sup>e </sup>Reich. Il fait le portrait d’un Hitler moins sûr de lui qu’on ne pourrait le croire, prêt à reculer quand il est acculé. Hitler veut avoir sa guerre, mais à condition qu’elle soit menée contre un ennemi facile à abattre.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"> Dans l’édition française de ce livre publiée en 1950, Schmidt salue la mise en place du plan Schuman, créant la Communauté européenne du charbon et de l’acier ; il écrit : <em>« j’attends l’avenir avec confiance »</em>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 12pt;"><em>Sur la scène internationale avec Hitler</em>, de Paul-Otto Schmidt, 1950, éditions Perrin.</span></p>
Bruno Lagrangehttp://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/about.htmlLes Inconnus dans la maison, d'Henri Decointag:leblogdebrunolagrange.hautetfort.com,2017-05-10:59423062020-09-24T08:01:56+02:002020-09-23T11:04:00+02:00 Raimu ténor du barreau Les Inconnus dans la maison Dans...
<p align="center"><em><u><span style="font-size: 12.0pt; font-family: 'Arial','sans-serif';">Raimu ténor du barreau</span></u></em></p><p align="center"><strong><span style="font-size: 18.0pt; font-family: 'Arial','sans-serif';">Les Inconnus dans la maison</span></strong></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><strong><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Dans ce film dont le scénario est de Clouzot, Raimu joue un avocat déchu et alcoolique qui reprend la robe pour défendre l’amoureux de sa fille. Sa plaidoirie aux Assises reste un modèle d’éloquence. Elle permet au spectateur d’aujourd’hui de savoir à quoi ressemblaient ceux que l’on appelait les </span></em></strong><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">ténors du barreau<em>.</em></span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> <em>Les Inconnus dans la maison </em>est un roman de Simenon dont Clouzot tira un scénario qu’Henri Decoin mit en scène. Au sens strict, ce n’est pas un film <em>de</em> Clouzot, qui, à l’époque, n’avait pas encore acquis le statut de metteur en scène ; mais c’est bien son esprit, ainsi que celui de Simenon, que l’on retrouve ici.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> <a href="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/01/1709664110.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-6173372" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leblogdebrunolagrange.hautetfort.com/media/00/01/549082802.jpg" alt="les inconnus dans la maison,henri decoin,raimu,juliette faber,jean tissier,jacques baumer,noël roquevert,mouloudji,clouzot,simenon" /></a> Dans le film, comme dans le livre, l’histoire débute la nuit, alors que la pluie tombe sur la ville. Un cadavre est découvert dans l’hôtel particulier de maître Loursat de Saint Marc, un ancien avocat qui, depuis la mort de sa femme, vit seul avec sa fille Nicole. Le Parquet ouvre une enquête et nomme un juge d’instruction, lequel concentre rapidement ses soupçons sur un club de jeunes gens qui a pour habitude de se réunir dans un café de la ville. Le magistrat suspecte particulièrement l’un des membres de la bande, Emile, qui est l’amoureux de Nicole.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Dans cette œuvre, l’intrigue est secondaire. Ce qui est essentiel, c’est l’atmosphère (qui est sombre) et les personnages. Le premier d’entre eux, c’est maître Loursat, magistralement interprété par Raimu. Depuis qu’il a perdu sa femme, il est devenu alcoolique : il ne cesse de boire parce que, dit-il, il ne peut pas ne pas boire. Raimu, avec son col cassé et son regard flasque, ne peut se déplacer sans sa bouteille à la main et se montre incapable de s’asseoir sans s’affaler sur son siège. Il se lève entre onze heures du matin et quatre heures de l’après-midi, et ne se préoccupe plus de sa réputation.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Or, dans cette ville de province, le « quand dira-t-on » est essentiel. Tout le monde se connaît ; ou, plus précisément, tous les bourgeois se connaissent entre eux. Le procureur est le beau-frère de maître Loursat, qui est, à ses yeux, la honte de la famille. Le magistrat ne veut surtout pas ébruiter l’affaire, d’autant plus que les membres du club sont des jeunes gens appartenant aux meilleures familles de la ville. Le scandale menace de rejaillir sur toute la bonne société. Heureusement, si l’on peut dire, le principal suspect, Emile, est d’un niveau social en dessous : il est commis dans une librairie et sa mère est obligée de travailler pour vivre. Les autres membres du club, eux, sont des fils à papa qui vivent dans l’oisiveté. Alors, pour tromper leur ennui, ils se retrouvent au bistrot et passent leurs soirées à discuter autour d’un verre. Pour égayer leurs soirées, ils se distraient comme ils peuvent, en chapardant.</span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Maître Raimu</span></em></strong><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"> rappelle</span></strong></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">ceux qu’on appelait alors les <em>ténors du barreau</em></span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> La première partie du film est consacrée à la description des mœurs de cette ville de province, tandis que la seconde est consacrée au procès. Maître Loursat a décidé de reprendre la robe pour défendre Emile. Il cesse alors de boire et essaie de redevenir le brillant avocat qu’il était auparavant. C’est une véritable métamorphose.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Devant les Assises, la plaidoirie de maître Loursat, ou plutôt de <em>maître Raimu</em>, est exemplaire : c’est un modèle d’éloquence, dans la lignée de ceux que l’on appelait alors les <em>ténors du barreau</em>. Il ne rechigne pas aux effets de manche et fait vibrer le jury au son de sa voix, comme s’il s’agissait d’un Stradivarius. A l'instar de Maigret, il fonctionne à l’intuition et fait appel à son imagination pour éclaircir l’affaire qui lui est soumise.</span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Ce film présente un tableau peu reluisant</span></strong></span></p><p style="text-align: center;" align="center"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">de la bourgeoisie de province</span></strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> Tourné sous l’Occupation, le film fut produit par la Continental, société fondée par la Propagande allemande. Cela resta comme une tache sur cette œuvre et entraîna sa censure à la Libération, d’autant plus que l’on crut déceler des relents d’antisémitisme dans la manière dont est présenté le personnage joué par Mouloudji, l’acteur interprétant l’un des membres de la bande.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> D’une manière générale, on peut supposer que le tableau peu reluisant de la bourgeoisie de province, telle qu’elle est dépeinte dans ce film, avait tout pour déranger. Dans cette petite ville règne un esprit étriqué. Les enfants de notables sont étouffés par leurs parents et cherchent à échapper au conformisme de leur classe sociale ; dans ce but ils sont prêts à tous les écarts.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> On retrouve ici des thèmes que Clouzot allait plus tard développer dans son œuvre, une fois devenu son propre metteur en scène. On peut rapprocher <em>Les Inconnus dans la maison </em>du<em> Corbeau</em>, que Clouzot réalisa quelques mois après, et de<em> La Vérité</em>, dans laquelle, en 1960, il dirigea Brigitte Bardot. Dans ces deux films, Clouzot montre une vision sombre de l’humanité.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> En 1992, Georges Lautner tourna une nouvelle adaptation du roman de Simenon, avec Belmondo dans le rôle de maître Loursat. Belmondo y vit l’occasion de rendre hommage à Raimu, pour qui il avait une grande admiration. Le film de Lautner fut un échec en salles, et c’est la version avec Raimu qui reste la version de référence.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> En voyant Raimu, le spectateur d’aujourd’hui peut se faire une idée de ce à quoi ressemblaient, jadis, les plaidoiries des <em>ténors du barreau</em>.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: 'Arial', 'sans-serif'; font-size: 12pt;"> </span></p><p><span style="font-size: 12pt;"><em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';">Les Inconnus dans la maison,</span></em><span style="font-family: 'Arial','sans-serif';"> d’Henri Decoin, 1942, avec Raimu, Juliette Faber, Jean Tissier, Jacques Baumer, Noël Roquevert et Mouloudji, DVD MK2.</span></span></p>