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04/03/2024

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22/11/2021

Illusions perdues, de Balzac

L’œuvre capitale dans l’œuvre de Balzac

Illusions perdues

Lucien de Rubempré, un jeune homme très beau et plein d’esprit, rêve de devenir un écrivain célèbre. Monté à Paris, il se lance dans le journalisme, espérant ainsi obtenir la gloire, la puissance et l’argent. Mais il finira par se brûler les ailes. Dans ce roman foisonnant et riche en intrigues, Balzac démonte les rouages de la presse, s’inquiète de sa puissance, pointe ses dérives et prédit que le journalisme sera la folie de notre temps.

            Lucien de Rubempré est un garçon de vingt-deux ans, beau comme un dieu grec. Il est mince, blond, aux yeux bleus ; sa beauté est féminine, nous précise Balzac. En tout cas, les dames de la bonne société de son Angoulême natale se pâment devant lui. Il est plein d’esprit et écrit avec talent. La nature l’a gâté, mais il possède un défaut qui pourrait gâcher toutes ses qualités : il est vaniteux et a une haute idée de lui-même. Son véritable nom est Lucien Chardon, mais il prétend s’appeler Lucien de Rubempré, Rubempré étant le nom de jeune fille de sa mère, qu’il entend relever. Il veut acquérir la gloire, la puissance et l’argent. Ne doutant pas de son talent, il croit que son recueil de vers Les Marguerites et son roman L’Archer de Charles IX, s’ils étaient édités, rencontreraient tout de suite le succès et lui procureraient la gloire littéraire.

  Illusions perdues, Balzac, La Comédie humaine          Plein d’ambition, Lucien monte à Paris, bien décidé à percer dans les milieux littéraires. Ses manuscrits à la main, il va voir Dauriat, libraire-éditeur. Mais ce dernier dédaigne ses œuvres : il ne veut pas prendre le risque d’éditer un inconnu. Dauriat privilégie les écrivains qui ont déjà un nom connu et dont la notoriété assure le succès : « On n’entre ici qu’avec une réputation faite ! Devenez célèbre, et vous y trouverez des flots d’or » déclare Dauriat à Lucien ; lequel, dépité, répond : « Mais, Monsieur, si tous les libraires (libraires=éditeurs, NDLA] disent ce que vous dites, comment peut-on publier un premier livre ? »

Balzac prend le contre-pied de Walter Scott

            Lucien rencontre un jeune écrivain, Daniel d’Arthez : celui-ci accepte de lire le manuscrit de L’Archer de Charles IX, puis donne à Lucien quelques conseils pour améliorer son style narratif. C’est l’occasion pour Balzac, à travers d’Arthez, d’exposer sa conception du roman et de son mode de construction. Balzac, ou plus précisément d’Arthez, prend le contre-pied de Walter Scott : il déconseille à Lucien d’ouvrir son roman par un dialogue, la forme littéraire la plus facile ; il lui recommande de commencer par des descriptions qui doivent précéder le dialogue : « Que chez vous le dialogue soit la conséquence attendue qui couronne vos préparatifs ». Balzac en profite pour s’en prendre aux libraires-éditeurs, qui ont peur du risque et veulent absolument dénicher un Walter Scott à la française qui leur assurerait le succès ; il nous dit qu’ils ont tout faux et feraient mieux de faire preuve d’originalité : « Une des plus grandes niaiseries du commerce parisien est de vouloir trouver le succès dans les analogues, quand il est dans le contraire. » En conclusion, d’Arthez conseille à Lucien de remanier son manuscrit et de beaucoup travailler ; la route sera longue, mais à la longue, sa peine sera récompensée.

Il n’y a pas de meilleure publicité qu’une bonne polémique

            Parallèlement, Lucien fait une autre rencontre, celle d’un jeune journaliste, Etienne Lousteau, qui écrit des critiques de livres et de spectacles. Aussitôt, Lucien est fasciné par le métier de journaliste et les facilités qu’il procure : Lousteau entre sans payer dans les théâtres, et les gens importants sont pleins d’égard pour lui. Il fait miroiter à Lucien les possibilités que procure le métier, un métier facile à exercer, le journaliste n’ayant pas à faire preuve d’originalité. Comme le précise Lousteau, il est là pour relater et commenter le travail des autres : « Mon cher, travailler n’est pas le secret de la fortune en littérature, il s’agit d’exploiter le travail d’autrui. »

                        Les journalistes font la pluie et le beau temps, et leur arme suprême est de faire l’impasse totale sur un sujet, car il n’y pas de meilleure publicité qu’une bonne polémique pour assurer la notoriété d’un roman ou d’une pièce, selon Lousteau : « Les actrices payent aussi les éloges, mais les plus habiles payent les critiques, le silence est ce qu’elles redoutent le plus. Aussi une critique, faite pour être retoquée ailleurs, vaut-elle mieux et se paye-t-elle plus cher qu’un éloge tout sec, oublié le lendemain. La polémique, mon cher, est le piédestal des célébrités. »

            Dès qu’il a compris le pouvoir de la presse, Lucien veut en être et s’exclame : « Je triompherai ! » Daniel d’Arthez et ses amis du Cénacle le mettent en garde : « Tu serais si enchanté d’exercer le pouvoir, d’avoir droit de vie et de mort sur les œuvres de la pensée, que tu serais journaliste en deux mois. […] Tu n’as que trop les qualités du journaliste : le brillant et la soudaineté de la pensée. Tu ne refuseras jamais un trait d’esprit, dût-il faire pleurer ton ami. Je vois les journalistes aux foyers des théâtres, ils me font horreur. » Mais Lucien est décidé, sa voie est tracée ; il s’accroche et s’incruste dans Le Journal, où travaille Lousteau.

« Des articles lus aujourd’hui, oubliés demain,

ça ne vaut à mes yeux que ce qu’on les paye. »

Le journaliste dispose d’un pouvoir sur les autres : si un libraire-éditeur déplaît à un rédacteur, alors, même s’il publie un chef-d’œuvre, son livre sera assommé par la critique. Ainsi, quand le nommé Nathan publie un livre qui plaît particulièrement à Lucien, celui-ci a de bonnes raisons de vouloir le « démolir », mais il se sent incapable de dire du mal d’un livre auquel il a trouvé de grandes qualités. Or, « le journaliste est un acrobate », selon Lousteau, qui montre à Lucien par quel tour de force il peut changer les qualités du livre en défauts, tout en lui trouvant des mérites, afin de convaincre le lecteur de l’impartialité de sa critique.

Cette attitude, qui consiste à écrire le contraire de ce que l’on pense, est-elle choquante ? Non, répondent les journalistes ; car, comme le souligne un confrère nommé Blondet, « tout est bilatéral dans le domaine de la pensée. Les idées sont binaires. » Blondet, s’appuyant sur l’exemple de Rousseau, apostrophe Lucien : « Rousseau, dans La Nouvelle Héloïse, a écrit une lettre pour et une lettre contre le duel, oserais-tu prendre sur toi de déterminer sa véritable opinion ? » Somme tout, un journaliste sage et raisonnable ne doit pas mettre trop de lui-même dans ses articles, car, ainsi que le souligne un journaliste du nom de Vernou, « des articles lus aujourd’hui, oubliés demain, ça ne vaut à mes yeux que ce qu’on les paye. » Selon lui, les journalistes sont « des marchands de phrase ».

Balzac nous montre les journalistes travaillant dans l’urgence. A dix heures du soir, aucun article à publier le lendemain n’est encore écrit. Les rédacteurs se mettent au travail dans la nuit et « bâclent » leurs articles en quelques minutes. Un bon journaliste est un journaliste qui écrit rapidement et qui sait s’adapter à toute situation.

Lucien apprend vite. Il publie un premier article bien ficelé, salué par ses confrères. « Il a de l’esprit », dit un rédacteur ; « Son article est bien », dit un autre. En étalant ses qualités professionnelles, Lucien croit qu’il sera récompensé par une ascension rapide. Bien au contraire ; car Lousteau, celui-là même qui l’avait introduit au Journal, va le jalouser : « En regardant Lousteau, [Lucien] se disait : « Voilà un ami ! » sans se douter que déjà Lousteau le craignait comme un dangereux rival. Lucien avait eu le tort de montrer tout son esprit : un article terne l’eût admirablement servi. »

            Lucien sera victime de la jalousie de ses confrères, mais aussi de lui-même, de sa vanité et de ses faiblesses de caractère. Pourtant plein d’esprit, il prend tout au premier degré ; il boit les compliments qui lui sont adressés, sans douter de leur sincérité ; et il ne comprend pas qu’il affronte des adversaires qui voient plus loin que lui et jouent, si l'on peut dire, du billard à trois bandes.

Balzac nous met en garde contre la presse,

« ce cancer qui dévorera peut-être le pays »

            « Le journalisme sera la folie de notre temps ! » s’exclame, dans un élan visionnaire, un personnage du roman, qui anticipe le développement à venir de la presse. Dans la préface du livre, Balzac lui-même nous met en garde contre la presse, « ce cancer qui dévorera peut-être le pays ». Il s’inquiète de la puissance de la presse et pointe des dérives qui, deux siècles après la publication de son livre, n’ont fait que s’amplifier.

            Balzac accordait une importance première aux Illusions perdues, dont il disait que c’est « l’œuvre capitale dans l’œuvre ». Pourtant c’est un roman qui, au premier abord, semble difficile à lire. Le livre est épais, l’intrigue est foisonnante, et les personnages sont nombreux. Si le lecteur ne se montre pas patient, il aura du mal à accrocher et se découragera vite. Si, en revanche, il a l’esprit disponible, alors il se passionnera pour les aventures et les mésaventures de Lucien de Rubempré ; il sera emporté dans un tourbillon d’intrigues et de manipulations qui ne cesse d’enfler au fil des pages ; il trouvera le roman si riche que, après l’avoir refermé, toute lecture d’un autre auteur risque de lui paraître fade. Illusions perdues est une œuvre maîtresse de Balzac : son génie romanesque et son talent visionnaire éclatent au fur et à mesure que l’histoire avance.

            Déjà très riche en péripéties, les Illusions perdues sont la porte d’entrée de Splendeurs et misères des courtisanes, roman qui racontent la suite de l’histoire de Lucien de Rubempré, et qui s’annonce tout aussi passionnant. A la fin des Illusions perdues, le lecteur s’est tellement attaché à Lucien qu’il est navré d’avoir assisté à son naufrage. Il le laisse en si fâcheuse position, qu’il n’a qu’une envie : savoir ce qu’il advient de lui.

 

Illusions perdues de Balzac (1843), collections Folio, Garnier et Le Livre de Poche (On pourra préférer l’édition du Livre de Poche plus aérée, qui reprend la division en chapitres tels qu’ils furent publiés en feuilleton dans la presse.)

19/05/2021

Camille Claudel, de Bruno Nuytten

Le portrait d’une artiste passionnée

Camille Claudel

Isabelle Adjani a fait sortir de l’ombre Camille Claudel en retraçant sa vie dans ce film dont elle a confié la réalisation à Bruno Nuytten. Elle incarne une jeune femme convaincue de sa vocation d’artiste. Sa rencontre avec Rodin doit être la chance de sa vie. Ce sera la source de son malheur.

            Dans la famille Claudel on connaissait Paul, l’écrivain, mais on avait oublié l’existence de sa sœur Camille, le sculpteur, jusqu’à ce qu’Isabelle Adjani lui redonne vie dans un film biographique sorti en 1988. Elle en confia la réalisation à Bruno Nuytten, lequel centra le film sur la relation qu’entretinrent Camille et Rodin.

     camille claudel,bruno nuytten,adjani,depardieu,laurent grévill,alain cuny,madeleine robinson       L’histoire débute en 1882, au moment de leur première rencontre : Rodin, ou plutôt maître Rodin, ainsi qu’on l’appelle respectueusement, est un artiste reconnu et couvert d’honneur ; il est dans la force de l’âge, tandis que Camille est une jeune fille qui fait ses débuts dans la vie ; elle est convaincue de sa vocation d’artiste, et sa rencontre avec Rodin semble être la chance de sa vie. Le maître s’intéresse à son travail et la prend sous sa protection. Il la fait venir dans son atelier et l’initie à son art. Rodin a une personnalité hors du commun et fascinante : ainsi, quand il est amené à découvrir une sculpture faite par un autre, plutôt que de la regarder d’emblée, il préfère, dans un premier temps, fermer les yeux et la tâter pour en sentir les formes. Il donne à Camille des conseils judicieux, lui recommandant de ne pas penser en surface, mais en relief, et de ne pas hésiter à forcer sur les muscles pour donner du volume à ses œuvres. La proximité entre les deux êtres est devenue telle que Camille est non seulement la collaboratrice de Rodin, mais aussi l’un de ses modèles et l’une de ses maîtresses.

            Camille mène une vie d’artiste qui est en complet décalage avec son milieu social : les Claudel sont de grands bourgeois fiers de leur nom, et Mme Claudel est profondément choquée de voir que sa fille préfère jouir de sa liberté, plutôt que de se ranger et de mener une vie convenable. Mais M. Claudel, lui, a des idées plus larges, et il croit en la vocation de Camille. Il l’autorise à entamer sa dot pour assouvir sa passion. Plein d’admiration, il se constitue une espèce de press-book dans lequel il colle soigneusement les coupures de presse consacrées à sa fille et à ses expositions. Cependant, avec le temps, il commence à douter de sa fille et se demande si sa rencontre avec Rodin, plutôt que d’être une chance, ne pourrait pas être la source de son malheur. Il soupçonne le grand homme de l’exploiter et s’inquiète de savoir si au moins il la paye.

Dans un moment de furie,

Camille détruit une bonne partie de son œuvre

            Quand Camille ouvre les yeux et prend conscience que Rodin l’a utilisée à son profit, il est trop tard ; les années ont passé et sa jeunesse a fui. Elle l’accuse alors de lui avoir tout volée, ses années et son travail. Lui, il s’en défend, prétextant d’avoir à chaque fois cherché à l’aider. En fait, l’attitude du grand homme est difficile à cerner. D’un côté on a l’impression qu’il n’hésite pas à mettre ses femmes et ses ouvriers au service de son art et de sa réussite : on le voit mener une vie de grand bourgeois habitant dans une vaste demeure, il n’est pas un artiste maudit condamné à la misère, mais un ambitieux assoiffé d’honneurs et prêt à toutes les bassesses pour avancer dans la carrière ; d’un autre côté on apprend, au cours du film, qu’il n’hésite jamais à user de ses relations pour appuyer Camille et lui susciter des commandes, quand l’occasion lui en est fournie.

            Au milieu de ses déboires, Camille trouve un restant de stabilité auprès de son frère cadet Paul, dont elle est très proche. Elle contribue à son initiation en lui faisant découvrir un écrivain à la réputation sulfureuse : Rimbaud. Mais elle est décontenancée quand il lui annonce sa conversion au catholicisme. Et quand, devenu diplomate, il quitte la France pour New-York, elle est carrément déboussolée ; car, en perdant Paul, elle perd son dernier repère. Elle se réfugie alors dans son art et y met toute son énergie. Elle vit dans l’isolement, enfermée dans son atelier qui se transforme peu à peu en cour des miracles. Elle a soif de reconnaissance et souffre de ne pas la trouver. Devenue aigrie, elle finit par indisposer les âmes bienveillantes à son égard. Elle se montre désagréable avec ceux qui lui offrent leur aide et n’honore pas les commandes qu’ils lui procurent. Elle se consume peu à peu et, à force de ne plus parler à quiconque, elle commence à perdre l’usage de la parole. Dans un moment de furie, elle détruit une bonne partie de son œuvre. Constatant sa folie, sa famille envisage de l’interner.

Dans le film, une espèce de clair-obscur

donne du volume aux êtres de chair et aux œuvres de marbre

            Isabelle Adjani dans le rôle de Camille Claudel n’est pas sans rappeler le personnage d’Adèle Hugo, qu’elle avait joué dix ans plus tôt, sous la direction de Truffaut. Elle est pleine de passion et se montre presque violente dans ses sentiments. Depardieu joue un Rodin à la silhouette imposante, reconnaissable à son chapeau d’artiste à larges bords ; c’est un jouisseur qui dévore la vie et les femmes. Alain Cuny dans le personnage de M. Claudel est grave, hiératique et sombre. Il est dans son propre rôle d’homme de théâtre quand il déclame à haute voix des vers de son fils Paul.

            Avant d’être réalisateur, Bruno Nuytten avait d’abord été chef opérateur, si bien qu’ici il a particulièrement soigné l’image. Le film a été tourné en décors naturels ; seule fait exception la tour Eiffel, montrée en arrière-plan, et que l’on voit s’élever vers le ciel au fur et à mesure que l’histoire avance dans le temps. La lumière est très importante : une espèce de clair-obscur donne du volume aux êtres de chair et aux œuvres de marbre. Seule la bande-son et les dialogues auraient gagné à un être un peu plus clairs. Le film est long, il dure près de trois heures, et il est lent, ce qui peut décourager les spectateurs impatients. Mais, les autres, après avoir vu ce film, garderont longtemps en mémoire le personnage de Camille.

            Isabelle Adjani, en incarnant Camille Claudel, aura largement contribué à faire sortir son œuvre de l’ombre. Depuis un musée Camille-Claudel a ouvert ses portes, à Nogent-sur-Seine.

 

Camille Claudel, de Bruno Nuytten, 1988, avec Isabelle Adjani, Gérard Depardieu, Laurent Grévill, Alain Cuny et Madeleine Robinson, DVD Studiocanal.