04/04/2016
Médecin de campagne, de Thomas Lilti
Eloge du médecin à l’ancienne
Médecin de campagne
Dans Médecin de campagne, François Cluzet interprète un généraliste à l’ancienne, qui ne cherche pas à faire du chiffre et qui prend le temps d’écouter ses patients. Marianne Denicourt joue le médecin appelé à le seconder en vue d’un remplacement. Le film de Thomas Lilti défend une certaine idée de la médecine.
Dans son précédent film, Hippocrate, Thomas Lilti décrivait le monde de l’hôpital ; deux ans après, il revient avec un nouveau film médical, dans lequel, comme son titre l’indique, il fait le portrait d’un médecin de campagne. Le spectateur suit le docteur Jean-Pierre Werner dans son quotidien fait de consultations à son cabinet et de visites aux malades. Dès le début du film, Jean-Pierre Werner apprend qu’il est atteint d’une tumeur. Il prend auprès de lui le docteur Nathalie Delezia, afin que, dans un premier temps, elle le seconde, en vue, à terme, de le remplacer.
Le film prend la forme d’une chronique. A la manière de Huysmans qui, dans ses romans, voulait se débarrasser de l’intrigue traditionnelle, Thomas Lilti prend prétexte de son scénario, qui est squelettique, pour montrer différentes situations auxquelles un médecin peut être confronté.
Le Dr Werner est un médecin à l’ancienne, il ne cherche pas à faire du chiffre et prend le temps d’écouter ses patients. Comme autrefois, il reçoit chez lui, dans sa maison, sans rendez-vous ; et il fait sa tournée à travers les villages et les fermes du pays.
Médecin de campagne délivre un certain nombre de messages dont ceux-ci :
- Le patient a intérêt à être concis et précis quand il décrit au médecin les symptômes qu’il ressent, car il est établi qu’en moyenne un médecin coupe la parole à son patient toutes les vingt-deux secondes, alors que, dans 90% des cas, le diagnostic est contenu dans les propos du patient ;
- Il faut faire preuve de discernement avant de décider d’hospitaliser une personne âgée, car le remède peut être pire que le mal ; le vieillard risque d’être désorienté et d’être plus affaibli à sa sortie de l’hôpital qu’il ne l’était avant ;
- Le médecin est là pour réparer les erreurs de la nature, qui produit de belles choses, mais aussi des choses laides, car il y a une forme de barbarie dans la nature, si bien que la médecine est par essence contre-nature ;
- L’informatique ne fait pas gagner au médecin autant de temps qu’on le croit, et souvent le gain est illusoire ;
- Il faut se méfier des projets de maisons de santé et autres pôles médicaux, qui visent à regrouper des professionnels de santé sous un même toit, car ces projets obéissent bien souvent à des motifs financiers et sont avant tout des opérations immobilières ne répondant pas strictement à un besoin d’ordre médical ;
- Etre médecin de campagne est un sacerdoce, à un point tel que, si le médecin prend trop à cœur son métier, il risque l’épuisement professionnel ;
- Le médecin est un patient comme les autres, il se croit immortel et irremplaçable, mais ne l’est pas ; quand il tombe malade, il est traversé par les mêmes doutes et les mêmes angoisses que le commun des mortels.
Dans ce film, c’est donc une certaine idée de la médecine que défend Thomas Lilti, lui-même ancien médecin.
Médecin de campagne est remarquablement interprété par François Cluzet et Marianne Denicourt, lui dans le rôle du médecin titulaire et elle dans le rôle du médecin remplaçant. Il la rabroue et ils se chamaillent de temps en temps, comme dans les comédies américaines d’antan.
Médecin de campagne, de Thomas Lilti, 2016, avec Fraçois Cluzet et Marianne Denicourt, actuellement en salles.
07:31 Publié dans Etude de moeurs, Film, Société | Tags : médecin de campagne, thomas lilti, françois cluzet, marianne denicourt | Lien permanent | Commentaires (0)
07/07/2014
Quatre Etoiles, de Christian Vincent
Comédie sur la Côte
Quatre Etoiles
Cette comédie, réalisée par Christian Vincent, est une bonne surprise. Les situations sont amusantes et les dialogues sont de qualité. Isabelle Carré et José Garcia se chamaillent tout au long du film. Quant à François Cluzet, il interprète un ancien pilote de course dont l’horizon intellectuel ne dépasse pas le capot de ses voitures.
Le réalisateur Christian Vincent s’est fait connaître en 1990 avec le film La Discrète,qui fit de Fabrice Lucchini une vedette. Malgré ce succès, sa carrière, par la suite, a plutôt été discrète, si l’on peut dire. Avec Quatre Etoiles, sorti en 2006, Christian Vincent donne le meilleur de lui-même et montre ses qualités de réalisateur, de dialoguiste et de directeur d’acteurs.
France, que ses amies surnomment Franssou, est une jeune femme d’une trentaine d’années. Sa tante meurt. Elle hérite de 52 000 euros. 52 000 euros, c’est beaucoup et c’est peu à la fois. C’est beaucoup d’argent d’un seul coup, mais c’est trop peu pour entrevoir d’arrêter de travailler. Alors Franssou décide de dépenser son héritage sans attendre, elle descend en solitaire sur la Côte et s’offre la vie de palace pour quelques jours.
Descendue dans un grand hôtel de Cannes, son chemin croise celui de Stéphane, un petit escroc aux minables combines. Stéphane a urgemment besoin de 10 000 euros pour rembourser une dette de jeu. Quand il a connaissance de la somme que Franssou a en sa possession, il se rapproche d’elle. Tout en devenant vite inséparables, Stéphane et Franssou entretiennent des rapports aigres-doux et finissent par se chamailler. Par ailleurs, Stéphane essaye de vendre une villa qui ne lui appartient pas, il croit avoir trouvé un pigeon en la personne de René, un ancien pilote de course qui vit aux milieux de ses voitures. Franssou va lui donner un coup de main dans son escroquerie, en séduisant René.
Quatre Etoiles est vraiment une bonne surprise. Le film rappelle les comédies hollywoodiennes de Lubitsch ou de Hawks, ou encore Désire (Desire), de Borzage. Un homme et une femme se rencontrent fortuitement, ils se chamaillent, ne se quittent plus et tombent amoureux l’un de l’autre. Le décor est somptueux, les couleurs sont chatoyantes, les situations sont amusantes, les répliques fusent, et la direction d’acteurs est maîtrisée.
Isabelle Carré, dans le rôle de Franssou, est une fille délurée pleine de fraicheur ; José Garcia est d’un sans-gêne incroyable dans le rôle de Stéphane ; quant à François Cluzet, il montre encore une fois qu’il est un grand acteur en jouant René, l’homme dont l’horizon intellectuel ne va plus loin que le capot de ses voitures.
C’est à travers le personnage de René que le spectateur peut mesurer la qualité des dialogues écrits par Christian Vincent. Un bon dialoguiste arrive à donner à chaque personnage une identité, de telle façon qu’il parle avec ses propres mots. Dans un film réussi, la manière de s’exprimer ne doit pas être interchangeable entre les acteurs. Ici, René accumule les lieux communs et se trouve incapable de finir ses phrases ; ce qui serait irritant dans la vraie vie devient à l’écran un véritable plaisir.
Quatre Etoiles, de Christian Vincent (2006), avec Isabelle Carré, José Garcia et François Cluzet, DVD StudioCanal.
08:00 Publié dans Comédie, Film | Tags : quatre etoiles, christian vincent, isabelle carré, josé garcia, françois cluzet | Lien permanent | Commentaires (0)