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25/01/2016

J'ai quinze ans et je ne veux pas mourir, de Christine Arnothy

Le siège de Budapest vécu par une fillette

J’ai quinze ans et je ne veux pas mourir

Ce livre, qualifié d’autobiographie, est le récit au jour le jour du siège de Budapest, en 1945. L’auteur, Christine Arnothy, raconte le calvaire qu’elle vécut, alors qu’elle n’avait que quinze ans. Elle fait partager au lecteur ses émotions et sa peur de la mort, dans une ville en proie aux bombardements.

            En 1954 paraissait J’ai quinze ans et je ne veux pas mourir. Le succès du livre fut immédiat. Son auteur, Christine Arnothy, était une jeune réfugiée hongroise installée en France. Quelques années plus tôt, elle avait fui son pays natal, en compagnie de ses parents ; ils étaient partis sans bagage, elle-même emportant pour seul bien les feuillets de son journal, cousus dans son manteau. C’est ce journal qui est la source de J’ai quinze ans et je ne veux pas mourir. Christine Arnothy y raconte au jour le jour comment elle vécut le siège de Budapest et le calvaire enduré par ses habitants au début de l’année 1945.

    j’ai quinze ans et je ne veux pas mourir,christine arnothy        La fillette et ses parents habitaient alors un immeuble en bordure du Danube. Au début des combats, ils trouvèrent refuge dans la cave : « Les trois premiers jours passèrent assez vite. A chaque craquement de l’escalier, nous pensions : voilà les Russes, les combats ont pris fin près d’ici, nous pourrons remonter dans nos chambres et renouer le fil de notre existence […]. Au cinquième jour de notre exil dans les souterrains, il fut évident que les Allemands avaient décidé de défendre la ville. C’est alors que nous perdîmes toute notion du temps. Les journées mortelles, angoissantes, se succédèrent avec une lenteur accablante. » Les Allemands, qui n’ont plus rien à perdre, sont décidés à vendre chèrement leur peau et les bombardements deviennent presqu’incessants.

            Les locataires de l’immeuble, qui s’ignoraient jusqu’ici, en sont réduits à vivre dans la même cave : « Ils dormaient, mangeaient, se lavaient et se chamaillaient dans la promiscuité la plus totale. » Et ensemble ils sont condamnés à affronter la peur de la mort, que chacun ressent individuellement à chaque bombardement. Quand un prêtre leur rend visite dans la cave, Christine se confesse à lui : « Je ne veux pas mourir, mon père, lui dis-je presqu’en pleurant. Je n’ai que quinze ans et j’ai affreusement peur de la mort. Je veux vivre encore. »

            Suite à un vol de vivres, des soldats allemands menacent de fusiller tous les locataires de l’immeuble. Christine a alors très peur, mais le voisin de ses parents, un magistrat en retraite, a encore plus peur qu’elle : « Le procureur général criait qu’il voulait encore vivre. Je me disais qu’il avait déjà vécu quatre-vingt ans, tandis que, moi, je n’en avais que quinze, et j’avais plus de raison que lui de pleurer… » Et c’est le procureur général qui manifestera le plus vif soulagement à la perspective d’échapper à la mort.

Dans cette ville en ruines, les cœurs durs ont plus de chances

de survivre que les cœurs tendres

            Le récit de Christine Arnothy montre bien à quel point la guerre bouleverse les relations sociales. Le chaos finit par s’installer dans la ville, et, dès que les Allemands sont partis, des habitants s’adonnent au pillage. Même le procureur général participe au sac du tribunal. Christine Arnothy le constate : « Toutes les notions morales sont bouleversées dans cette ville en ruine. Le vice compte pour la vertu et les cœurs durs ont plus de chances de survivre que les cœurs tendres. »

            La peur ne disparaît pas avec l’arrivée des Russes, car ils ne sont pas les libérateurs que l’on croyait qu’ils seraient. Une femme de soixante-treize ans dit avoir été violée par cinq soldats russes, l’un après l’autre.

            Christine et ses parents réussissent à s’échapper de Budapest occupé par les Russes, et gagnent la maison qu’ils possèdent en périphérie. Ils y retrouvent tante Julia à qui ils ont prêté leur maison. Quand elle les voit arriver, tante Julia n’est pas folle de joie. Au contraire, elle est ébahie et leur déclare : « Comment, vous n’êtes pas tous morts, vous autres ? » Elle semble très déçue qu’ils soient encore en vie. Comme le note Christine Arnothy, elle les avait probablement pleurés un moment, puis elle avait admis qu’ils étaient morts, et s’était consolée à la perspective de garder la maison pour elle et ses enfants. A Budapest et dans ses environs, règne le chacun pour soi. L’essentiel étant de survivre soi-même, cela devient un luxe de se soucier de son prochain.

            Malgré tout, dans ce récit, il y a de rares moments d’humanité ; il n’y a alors plus d’Allemands, plus de Russes, plus de Hongrois, mais seulement des frères humains. Ces moments sont brefs et n’empêchent pas le tragique de se produire.

            J’ai quinze ans et je ne veux pas mourir est un récit court et facile à lire, qui montre le vrai visage de la guerre. Un lecteur adolescent s’identifiera sans mal à la narratrice.

 

J’ai quinze ans et je ne veux pas mourir, de Christine Arnothy, 1954, collection Le Livre de Poche.

16/11/2015

Adieu, de Balzac

Le récit saisissant de la retraite de Russie

Adieu

Sous forme de fiction, Balzac nous raconte la retraite de Russie. Son récit est digne d’un spectacle de cinéma ; la neige est omniprésente, les soldats sont épuisés et succombent à l’apathie. Seuls survivront ceux qui auront la volonté et la force de passer la Bérésina avant l’arrivée des Russes.

            L’historien Jean Tulard, grand spécialiste de Napoléon, recommande la lecture d’Adieu pour mieux comprendre la réalité de ce que fut la retraite de Russie.

  adieu,balzac,la comédie humaine          La nouvelle de Balzac n’excède pas une centaine de pages et se décompose en trois parties distinctes. La première partie se passe à l’été 1819. Deux chasseurs, le colonel Philippe de Sucy et le marquis d’Albon, se promènent en forêt et se perdent en chemin. Ce jour-là il fait chaud ; le marquis d’Albon, qui a de l’embonpoint, transpire et se plaint d’être fatigué de marcher. Le colonel de Sucy sourit des gémissements de son compagnon et lui dit gentiment : « Ah ! mon pauvre Albon, si vous aviez été comme moi au fond de la Sibérie… » Ils aperçoivent une maison. Le marquis d’Albon est soulagé, lui qui n’en peut plus et qui ne rêve que de trouver « une omelette, du pain de ménage et une chaise. »

            Arrivés à la grille de la maison, les deux amis aperçoivent une femme qui visiblement a perdu la raison. Le colonel de Sucy a un choc, car il croit avoir reconnu Stéphanie, une jeune femme avec qui il a vécu la retraite de Russie, en 1812. De son côté, le marquis d’Albon, dont la curiosité a été piquée au vif, veut en savoir plus sur le passé de son ami. L’un des hôtes de la maison, qui est le médecin de Stéphanie, le renseigne sur les événements qui eurent lieu sept ans plus tôt. Sous forme de retour en arrière, il lui raconte la retraite de Russie.

            Le médecin fait le tableau d’une armée en déroute, au milieu de l’hiver russe. Napoléon et ses troupes ont précipitamment quitté Moscou. Il leur faut absolument franchir la Bérésina pour échapper à l’encerclement par les Russes. Mais, arrivés à hauteur du fleuve, Napoléon a une mauvaise surprise : les points de passage ont tous été détruits par l’ennemi. L’Empereur ne s’avoue pas vaincu pour autant. Les pontonniers du général Eblé s’enfoncent dans l’eau glacée du fleuve et entreprennent la construction d’un ouvrage de remplacement. Le pont achevé, la Grande Armée peut passer. Mais il faut faire vite, car les Russes approchent. Or, quelques heures plus tard, les derniers éléments de la Grande Armée n’ont pas encore franchi le fleuve. Des traînards continuent de converger vers le pont. Ils trouvent sur place du matériel abandonné et des chevaux qui pourraient servir de nourriture. Au lieu de profiter de la dernière chance qui leur reste de passer avant l’arrivée des Russes, ils préfèrent se laisser aller à se reposer, tant ils sont épuisés par les kilomètres parcourus dans l’hiver russe. Balzac rappelle l’omniprésence de la neige : « L’apathie de ces pauvres soldats ne peut être comprise que par ceux qui se souviennent d’avoir traversé ces vastes déserts de neige, sans autre boisson que la neige, sans autre horizon que la neige, sans autre perspective qu’un horizon de neige, sans autre élément que la neige ou quelques betteraves gelées, quelques poignées de farine ou de la chair de cheval. » Mêlés aux traînards, se trouvent des femmes et des enfants qui avaient accompagné la Grande Armée en Russie. Il y a là une jeune femme, Stéphanie, qui voyage avec son mari, un général, beaucoup plus âgé qu’elle ; eux non plus n’ont pas encore franchi le fleuve. Auront-ils le temps de passer, sachant qu’Eblé a reçu l’ordre d’incendier le pont avant l’arrivée des Russes.

Celui qui succombe à la fatigue et au sommeil

risque de ne plus jamais se relever

            Dans cette armée en déroute règne le chacun pour soi. C’est le sauve-qui-peut général. La hiérarchie vole en éclats. La notion de civilisation disparaît. L’homme retourne à l’état sauvage, presqu’à l’état bestial. Le baron Philippe de Sucy est arrêté par des traînards qui, armes à la main, s’emparent de son cheval pour le manger. Le mari de Stéphanie, qui est tombé dans une espèce d’apathie, est réduit à l’état de loque. Dans ce désastre, malheur aux faibles. Celui qui succombe à la fatigue et à la tentation de dormir risque de ne plus jamais se relever.

            Dans ce contexte, il y a cependant des héros, tels les pontonniers du général Eblé, qui se sacrifient pour que leurs camarades puissent passer. Après le passage de la Bérésina, Eblé évoque « ces cinquante héros qui ont sauvé l’armée et qu’on oubliera ! » L’héroïsme côtoie la lâcheté, ainsi que l’apathie.

            Le récit de Balzac est saisissant. Un envoyé spécial n’aurait pas mieux fait. A la différence de Stendhal, Balzac n’a pas personnellement participé à la retraite de Russie, mais il a interrogé des survivants et s’est imprégné de leur témoignage. Presque minute par minute, le lecteur vit les terribles journées des 28 et 29 novembre 1812. Il n’a pas de mal ensuite à comprendre le traumatisme subi par les survivants.

            La troisième partie du récit ramène le lecteur en 1819, quand Philippe de Sucy retrouve Stéphanie, devenue folle suite au traumatisme subi en Russie. La fin est émouvante.

 

Adieu, de Balzac, 1830, collection Le Livre de Poche.

07/09/2015

Pétain, de Bénédicte Vergez-Chaignon

Du héros de Verdun à l’homme de Vichy

Pétain

Le livre de Bénédicte Vergez-Chaigon est un pavé d’un millier de pages, aux caractères serrés. L’auteur montre comment Pétain a pu, en moins de trois ans, passer du grade de colonel à la fonction de commandant en chef de l’armée française, et comment le vainqueur de Verdun, héros national, a pu se transformer en l’homme de Vichy, chef de l’Etat français et collaborateur avec l’ennemi.

            En ouverture de son livre, la très sérieuse historienne Bénédicte Vergez-Chaignon se livre à un exercice d’uchronie. Elle imagine que Pétain soit mort à la veille de la seconde guerre mondiale, en 1937 ou 1938 :

            « Mort à quatre-vingt-deux ou quatre-vingt-trois ans, le maréchal Pétain aurait été comblé d’honneurs. Ses cendres auraient été transférées à l’ossuaire de Douaumont, parmi les morts de Verdun, selon ses dernières volontés. […] Des rues, des établissements scolaires, des hôpitaux porteraient son nom, sans que personne ne trouve à y redire. Mais, en véritable personnage faustien, Philippe Pétain a acheté ses années de vie supplémentaires au prix de sa gloire et de sa postérité historique. »

  Pétain, Bénédicte Vergez-Chaignon          La lecture de cette biographie permet de mieux comprendre la personnalité de Pétain. Au printemps 1914, âgé de cinquante-huit ans, le colonel Pétain est un officier ordinaire, qui attend que l’heure de la retraite sonne. Il appartient à la génération qui se prépare à la revanche depuis plusieurs décennies. Etant âgé de quatorze ans en 1870, il était trop jeune pour combattre. Il s’apprête donc à partir en retraite sans avoir jamais fait la guerre. Mais, à l’été 1914, la guerre éclate et rebat les cartes.

            L’effectif de soldats mobilisés est tel, que le nombre d’officiers généraux n’est pas suffisant pour encadrer les divisions qui se mettent en place. Le grand quartier général est obligé de puiser dans le vivier des colonels. Ainsi le colonel Pétain est bombardé général et reçoit le commandement d’une division.

            Le 6 septembre 1914, sa division est impliquée dans de violents combats. Le général Pétain pourrait choisir de rester chaudement à l’arrière. Au lieu de cela, il « choisit de montrer l’exemple en se portant en avant de la première ligne, accompagné de quelques officiers », note Bénédicte Vergez-Chagnon, qui poursuit : « Ainsi apparaît l’un des éléments de ce qui constituera sa légende. »

Pétain acquiert une réputation d’organisateur

qui prépare soigneusement ses offensives

            L’ascension de Pétain est fulgurante. Simple colonel en 1914, il reçoit le commandement de l’armée de Verdun en 1916, puis, en 1917, il est nommé commandant en chef des armées du Nord et de l’Est, c’est-à-dire généralissime. Pétain a gagné une réputation d’organisateur, qui lui a permis de se distinguer. Avec lui, rien n’est improvisé, tout est réfléchi. Les offensives ne sont pas lancées prématurément, mais soigneusement organisées. Elles doivent être précédées de reconnaissance aérienne des positions ennemies, et de tirs d’artillerie précis et abondants.

            Pétain s’est aussi acquis la réputation d’être économe du sang des soldats. Bénédicte Vergez-Chaignon insiste cependant sur le fait que c’est par réalisme que Pétain veut en finir avec les percées inutiles et coûteuses en hommes. Ce n’est pas la compassion qui l’anime, car lui-même sait faire preuve de cruauté. Ainsi en Artois, écrit l’auteur, « le général fait ligoter et jeter par-dessus le parapet de la tranchée des hommes qui se sont mutilés volontairement en se tirant dans un membre, les exposant à une mort atroce différée. »

            En 1917, le nouveau commandant en chef Pétain est confronté à une grave crise qui touche l’armée : la guerre s’éternise et les mutineries se multiplient. Pétain fait face et apporte sa réponse : d’un côté il déclenche la répression contre ceux qu’il considère les meneurs et autorise les formes de justice expéditive avec condamnation à mort sans appel ; et d’un autre côté, une fois l’impression de terreur installée dans la troupe, il se préoccupe du quotidien des soldats, en améliorant notamment leur nourriture et leur équipement. Sans nul doute, cette méthode porte ses fruits. Mais, si Pétain redresse effectivement la situation, il n’est pas exagéré de dire que, fort de son succès, sa pensée s’est figée à la suite de Verdun et des mutineries. Dès cette époque, il acquiert la conviction d’avoir eu raison contre tout le monde et d’être le dernier recours pour faire face à une crise morale qui pourrait frapper le pays.

Le président Poincaré est effaré par le pessimisme de Pétain

            Alors que Pétain estime que sa méthode a fait ses preuves, assez curieusement il ne fait pas l’unanimité. Raymond Poincaré, président de la République, est effaré par son pessimisme. Il est vrai que dans presque toutes les situations Pétain, tel un Cassandre, multiplie les mises en garde et prévoit le pire. Ainsi, en cas d’échec, note l’auteur, « on ne pourra pas dire qu’il n’avait pas prévenu. » Clemenceau, président du Conseil, continue d’apporter son soutien à Pétain, mais, quand il s’agit de nommer un chef suprême à la tête des armées alliées, il donne la préférence à Foch. Dans son livre Le Tigre, publié en 1930, Jean Martet, qui fut son secrétaire, rapporte cette confidence que lui fit Clemenceau après la Grande Guerre :

            « A Doullens, je me suis trouvé entre deux hommes, l’un qui me disait que nous étions fichus, l’autre qui allait et qui venait comme un fou et qui voulait se battre. Je me suis dit : « Essayons Foch. Au moins, nous mourrons le fusil à la main. » J’ai laissé cet homme sensé, plein de raison, qu’était Pétain ; j’ai adopté ce fou qu’était Foch. C’est le fou qui nous a tirés de là. »

            Après la victoire de 1918, Pétain est couvert d’honneurs. Elevé à la distinction de maréchal de France, il est maintenu à la tête de l’armée française. En 1922, il a soixante six ans et, déjà, le général Buat, son second, note que le maréchal vieillit et qu’ « il lui arrive d’être embrouillé et peu compréhensible. »

La méthode Pétain en politique internationale

consiste à proposer d’emblée des concessions

pour montrer sa bonne volonté

            Dans les années qui suivent, le maréchal Pétain fait preuve de loyauté vis-à-vis de la République. Loin d’être un militaire factieux, il est au contraire un homme respectueux des institutions. Mais, pessimiste par nature, il voit la guerre approcher et se convainc que la France n’est pas prête. Il est très remonté contre le SNI, le syndicat national des instituteurs, et parle de « l’influence néfaste » qu’exercent certains maîtres sur leurs élèves. En 1934, pour la première fois, il parle de procéder au « redressement moral […] nécessaire au bien du pays. » Un an plus tard, le journal La Victoire lance l’appel : « C’est Pétain qu’il nous faut. »

            En mars 1939, Pétain est nommé ambassadeur à Madrid, auprès du gouvernement franquiste. Face au risque de guerre avec l’Allemagne, Pétain a pour mission d’obtenir la neutralité de l’Espagne. Cette ambassade sert de laboratoire à sa méthode en matière de relations internationales. A Madrid, Pétain rencontre Franco et cède à toutes ses demandes. Il s’agit, selon Bénédicte Vergez-Chaignon, de « proposer d’emblée des concessions, y compris majeures, pour montrer sa bonne volonté, demander ensuite que le partenaire, rival ou adversaire, agisse de même, être prêt à de nouvelles concessions si la première passe n’a pas abouti. En somme, une politique du toujours plus faible au toujours plus fort […]. » Cette méthode que Pétain utilise face à Franco, il la reproduira face à Hitler et se lancera dans la politique de collaboration avec l’Allemagne.

            En mai 1940, l’armée allemande envahit la France. Pétain est rappelé en France et entre au gouvernement. Devenu vice-président du Conseil, il est accablé par la débâcle et parle d’ « affreuse épreuve ». Il porte sa part de responsabilité, lui qui, quelques années auparavant, jugeait le massif des Ardennes infranchissable par l’armée ennemie. Pourtant, en juin 1940, Pétain apparaît comme le recours. Il ne croit plus du tout à un renversement de la situation militaire et se résigne à un armistice. Il veut le signer le plus tôt possible, de façon à ce qu’il soit assez avantageux. Selon l’auteur, « non seulement il pense que l’armistice préserve un avenir […], mais il pense être le mieux – le seul – pour en tirer quelque chose. » L’armistice signé, il fait voter une loi, le 11 juillet 1940, qui lui accorde les pleins pouvoirs, mais dans le cadre de la République. Dès le lendemain, un acte constitutionnel, outrepassant la loi votée la veille, fait de lui le chef de l’Etat et abolit la République.

            La seconde partie du livre est essentiellement consacrée aux quatre années passées par Pétain à la tête de l’Etat français. Très détaillée, elle intéressera surtout les spécialistes. En revanche, les 400 premières pages, sur Pétain avant Vichy, peuvent être lues par un public assez large.

 

Pétain, de Bénédicte Vergez-Chaignon, 2014, éditions Perrin.